Chère Liza,
Viens-tu encore sur Overblog? J'aimerais avoir ton avis sur Lene Marie Fossen, photographe d'un talent exceptionnel : j'ai vu deux fois le documentaire et comme toi, sans doute, je ne vois que l'art. La maigreur de cette femme ne m'étonne pas : elle en tire des photographies splendides et en apprenant à se voir, elle a appris à voir les autres si bien que l'ensemble des portraits qu'elle réalise en Grèce, et aussi à Lesbos auprès d'enfants arrivant du Proche Orient sont extraordinaires par leur expression. Je remercie le photographe qui l'a découverte et qui programme encore des expositions de ses oeuvres. Il semblerait qu'il y ait aussi un livre avec ses photos et sans doute des textes qu'elle a choisis.
Cette femme intelligente est hypersensible. Toi, Liza, tu ne la trouverais pas maigre parce que tu verrais au-delà tout ce qu'elle exprime. Je pensais qu'elle pesait plus que le poids que je viens de découvrir ( 17 kilos ). Par l'art, elle reprenait vie, et aurais pu aller assez loin. Un accident d'automobile a stoppé tout.
Je sens cette femme qui a démarré ses autoportraits après avoir vu une léproserie. Je me retrouve dans la situation où j'étais au mouroir de Calcutta : évidemment, les malades n'étaient plus que des squelettes mais j'entrais en relation avec eux et je ne voyais plus leur état. Ils me demandaient souvent de les toucher au niveau du thorax : ils étaient tuberculeux. Je le suis devenue aussi mais ceci n'a pas d'importance. Il y a trop de censure autour de ces sujets alors que le sauvetage par l'art est une excellente idée, et sans doute de loin la meilleure. J'ai une amie médecin qui travaille en ce sens : elle était dans le même atelier de sculpture que moi. Un regard relationnel est vital pour les personnes dont le poids est trop bas : c'est l'unique nourriture dont elles ont besoin quelle que soit la maladie qu'elles aient. Le rejet de la maigreur est une forme de racisme. Je crois que tu sais ce dont je parle si tu me lis.